• Dans un esprit Gothique... de la poésie... bon Jeudi...

    Bienvenue en ce jeudi de poésies, avec un auteur que les Gothiques aiment à lire... et moi aussi d'ailleurs...

    bonne visite et bonne lecture...

    bises de véro...

     

    Charles Baudelaire...

      

    Poète controversé et violemment attaqué de son vivant, Charles Baudelaire a été salué après sa mort comme "le vrai Dieu" (Rimbaud), "le premier surréaliste" (Breton), "le plus important des poètes" (Valéry), "le plus grand archétype du poète à l’époque moderne et dans tous les pays" (TS Eliot). Baudelaire est aussi considéré comme le chef de file des décadents (Charles Cros, Germain Nouveau, Huysmans), le maître à penser des symbolistes (Ghil, Samain, Moréas). En bref, par son œuvre novatrice et provocante, Baudelaire incarne à lui seul la modernité littéraire. L’œuvre de Baudelaire est étroitement liée à l’histoire de sa vie, qui commence peut-être à la mort de son père, alors qu’il n’a que six ans. Cette tragédie entraîne le second mariage de sa mère avec le général Aupick, un militaire représentant aux yeux du jeune Baudelaire l’horreur de la discipline, de la morale bourgeoise et de la religion établies.

    A 18 ans, Baudelaire est expulsé du lycée Louis le Grand à Paris, et son beau-père décide de le faire voyager jusqu’à Calcutta, en Inde. Baudelaire n’ira pas plus loin toutefois que la Réunion, dans l’Océan Indien. Revenu à Paris et majeur légal, Baudelaire encaisse l’héritage qui lui revient de son père, une grosse fortune dont il dilapide la moitié en six mois . Aupick met alors le reste de l’héritage sous le contrôle d’un huissier, et Baudelaire ne reçoit désormais que de maigres dividendes qui lui permettent d’éviter la misère. Pour survivre, Baudelaire commence à publier des articles dans des revues ainsi que ses traductions des œuvres d’Edgar Poe.

    En 1857, Baudelaire publie Les Fleurs du mal, qui font immédiatement scandale et sont interdits à la vente un mois après leur parution. Baudelaire est condamné par le tribunal à payer une amende – ce qui le plonge plus encore dans la misère, et à remanier les passages incriminés. Une nouvelle version du recueil est publié en 1861, mais ne se vend guère. Malgré ses efforts, Baudelaire ne parvient pas à se sortir de la misère, et sa créativité en souffre. Il se rend en Belgique dans l’espoir de trouver un éditeur, mais il en revient déçu, n’y ayant rencontré "qu’une très grande avarice". Il se venge en publiant un pamphlet, Pauvre Belgique.

    La pauvreté et les excès prédisposaient Baudelaire à une maladie, qui se déclare vers 1850. A partir de 1857, pour soulager ses violents maux de tête, Baudelaire utilise l’opium, comme son contemporain Thomas de Quincey, dont il analyse les Confessions d’un mangeur d’opium dans Les Paradis artificiels. Son "rhumatisme à la tête" ne le quitte plus à partir de 1860, et en 1866, alors qu’il est en Belgique, une crise plus grave le laisse paralysé et apathique. Il meurt le 31 août 1867 après une longue agonie. La propriété de ses œuvres complètes sera vendue pour une somme dérisoire, et sur son compte restait encore des sommes de l’héritage de son père.

    Au centre de l’expérience existentialiste et poétique de Baudelaire est le spleen, cette sorte de langueur de l’esprit qui empêche le poète de vivre la réalité dans sa consistance ordinaire. Le seul moyen de surmonter ce sentiment d’écœurement pour l’existence est d’écrire : "Subir le spleen, mais savoir le peindre, c’est passer d’une extrême faiblesse à l’effort créateur."

     

      

    La Fontaine de sang... 

     

    Il me semble parfois que mon sang coule à flots,
    Ainsi qu'une fontaine aux rythmiques sanglots.
    Je l'entends bien qui coule avec un long murmure,
    Mais je me tâte en vain pour trouver la blessure.

    A travers la cité, comme dans un champ clos,
    Il s'en va, transformant les pavés en îlots,
    Désaltérant la soif de chaque créature,
    Et partout colorant en rouge la nature.

    J'ai demandé souvent à des vins captieux
    D'endormir pour un jour la terreur qui me mine;
    Le vin rend l'œil plus clair et l'oreille plus fine!

    J'ai cherché dans l'amour un sommeil oublieux;
    Mais l'amour n'est pour moi qu'un matelas d'aiguilles
    Fait pour donner à boire à ces cruelles filles!

      

    le crépuscule du soir... 

     

    Voici le soir charmant, ami du criminel;
    II vient comme un complice, à pas de loup; le ciel
    Se ferme lentement comme une grande alcôve,
    Et l'homme impatient se change en bête fauve.

    O soir, aimable soir, désiré par celui
    Dont les bras, sans mentir, peuvent dire: Aujourd'hui
    Nous avons travaillé! - C'est le soir qui soulage
    Les esprits que dévore une douleur sauvage,
    Le savant obstiné dont le front s'alourdit,
    Et l'ouvrier courbé qui regagne son lit.
    Cependant des démons malsains dans l'atmosphère
    S'éveillent lourdement, comme des gens d'affaire,
    Et cognent en volant les volets et l'auvent.
    A travers les lueurs que tourmente le vent
    La Prostitution s'allume dans les rues;
    Comme une fourmilière elle ouvre ses issues;
    Partout elle se fraye un occulte chemin,
    Ainsi que l'ennemi qui tente un coup de main;
    Elle remue au sein de la cité de fange
    Comme un ver qui dérobe à l'Homme ce qu'il mange.
    On entend çà et là les cuisines siffler,
    Les théâtres glapir, les orchestres ronfler;
    Les tables d'hôte, dont le jeu fait les délices,
    S'emplissent de catins et d'escrocs, leurs complices,
    Et les voleurs, qui n'ont ni trêve ni merci,
    Vont bientôt commencer leur travail, eux aussi,
    Et forcer doucement les portes et les caisses
    Pour vivre quelques jours et vêtir leurs maîtresses.

    Recueille-toi, mon âme, en ce grave moment,
    Et ferme ton oreille à ce rugissement.
    C'est l'heure où les douleurs des malades s'aigrissent!
    La sombre Nuit les prend à la gorge; ils finissent
    Leur destinée et vont vers le gouffre commun;
    L'hôpital se remplit de leurs soupirs. - Plus d'un
    Ne viendra plus chercher la soupe parfumée,
    Au coin du feu, le soir, auprès d'une âme aimée.

    Encore la plupart n'ont-ils jamais connu
    La douceur du foyer et n'ont jamais vécu!

       

    Femmes damnées... 

     

    Comme un bétail pensif sur le sable couchées,
    Elles tournent leurs yeux vers l'horizon des mers,
    Et leurs pieds se cherchent et leurs mains rapprochées
    Ont de douces langueurs et des frissons amers.

    Les unes, cœurs épris des longues confidences,
    Dans le fond des bosquets où jasent les ruisseaux,
    Vont épelant l'amour des craintives enfances
    Et creusent le bois vert des jeunes arbrisseaux;

    D'autres, comme des sœurs, marchent lentes et graves
    A travers les rochers pleins d'apparitions,
    Où saint Antoine a vu surgir comme des laves
    Les seins nus et pourprés de ses tentations;

    II en est, aux lueurs des résines croulantes,
    Qui dans le creux muet des vieux antres païens
    T'appellent au secours de leurs fièvres hurlantes,
    O Bacchus, endormeur des remords anciens!

    Et d'autres, dont la gorge aime les scapulaires,
    Qui, recélant un fouet sous leurs longs vêtements,
    Mêlent, dans le bois sombre et les nuits solitaires,
    L'écume du plaisir aux larmes des tourments.

    O vierges, ô démons, ô monstres, ô martyres,
    De la réalité grands esprits contempteurs,
    Chercheuses d'infini dévotes et satyres,
    Tantôt pleines de cris, tantôt pleines de pleurs,

    Vous que dans votre enfer mon âme a poursuivies,
    Pauvres sœurs, je vous aime autant que je vous plains,
    Pour vos mornes douleurs, vos soifs inassouvies,
    Et les urnes d'amour dont vos grands cœurs sont pleins.
     

     

    (extrait des Fleurs du mal)...

      

    Remords posthume

     

     Lorsque tu dormiras, ma belle ténébreuse,
    Au fond d'un monument construit en marbre noir,
    Et lorsque tu n'auras pour alcôve et manoir
    Qu'un caveau pluvieux et qu'une fosse creuse;

     

    Quand la pierre, opprimant ta poitrine peureuse
    Et tes flancs qu'assouplit un charmant nonchaloir,
    Empêchera ton coeur de battre et de vouloir,
    Et tes pieds de courir leur course aventureuse,
     

    Le tombeau, confident de mon rêve infini
    (Car le tombeau toujours comprendra le poète),
    Durant ces grandes nuits d'où le somme est banni,
     

    Te dira: "Que vous sert, courtisane imparfaite,
    De n'avoir pas connu ce que pleurent les morts?"
    - Et le vers rongera ta peau comme un remords.
     

     

     

           

       Le Possédé

     

     Le soleil s'est couvert d'un crêpe. Comme lui,
    O Lune de ma vie! emmitoufle-toi d'ombre
    Dors ou fume à ton gré; sois muette, sois sombre,
    Et plonge tout entière au gouffre de l'Ennui;
     

    Je t'aime ainsi! Pourtant, si tu veux aujourd'hui,
    Comme un astre éclipsé qui sort de la pénombre,
    Te pavaner aux lieux que la Folie encombre
    C'est bien! Charmant poignard, jaillis de ton étui!
     

    Allume ta prunelle à la flamme des lustres!
    Allume le désir dans les regards des rustres!
    Tout de toi m'est plaisir, morbide ou pétulant;
     

    Sois ce que tu voudras, nuit noire, rouge aurore;
    II n'est pas une fibre en tout mon corps tremblant
    Qui ne crie: O mon cher Belzébuth, je t'adore!

      

    bon Jeudi et bonne visite... 

    bises... 


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